Carré 62
Carré d'étude réservé par Julie DESMARECAUX
Quand deux mondes dansent
Je suis à la rencontre d’une route, d’une piste cyclable et d’un sentier pour piétons, là où deux mondes s’entrelacent en un ballet incessant. Au premier acte, la scène est dominée par l’agitation : le vrombissement des moteurs, les sonnettes des vélos, les talons qui frappent le bitume, mêlés à des klaxons impérieux ou des bribes de conversations. La lumière verte donne le signal, et les danseurs s’élancent avec une frénésie calculée. Puis vient le rouge, une pause fugace où un père et ses enfants, cartables sur le dos, traversent avec précaution, portés par le rythme imposé du feu tricolore.
Le décor est contrasté : d’un côté, la route bordée de trottoirs bosselés et bétonnés, irréguliers comme un rythme brisé. De l’autre, la piste cyclable et son sentier de gravier, abrités sous une voûte d’arbres dont les feuilles bruissent comme des chuchotements d’arrière-scène. Là-bas, l’herbe caresse les chevilles, imprègne les chaussures de rosée, et le monde se fait soudain plus doux, presque tactile. Le craquement des graviers sous les pieds ou sous les pneus semble chuchoter à l’oreille, nous signalant la présence discrète d’un passant derrière nous.
Sous les arbres, le tumulte de la route s’estompe, remplacé par une mélodie plus intime. Les chaînes des vélos cliquettent, les pas sur le gravier forment une cadence feutrée, et parfois, si l’on tend l’oreille, on entend le chant des oiseaux percer l’air tranquille. C’est une danse différente, plus lente, où chaque son, chaque sensation – la rugosité des trottoirs, la douceur humide de l’herbe, le bruissement des feuilles – devient un mouvement gracieux et envoutant de ce grand ballet quotidien. Traverser cet espace, c’est passer d’un monde à l’autre, du tumulte à la sérénité, en laissant la danse guider nos pas.